Sébastien Castellion : « Tuer un homme, ce n’est pas défendre une doctrine, c’est tuer un homme »

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Résumé: Ce travail est une longue note de lecture sur plusieurs ouvrages: Conscience contre violence ou Castellion contre Calvin et Érasme de Stefan Zweig ; Les religions meurtrières d’Élie Barnavi ; Gouverner au nom d’Allah de Boualem Sansal et La pensée extrême, Comment des hommes ordinaires deviennent des fanatiques, de Gérald Bronner.

On y établit un parallèle entre ces extrémismes religieux, pour qui le meurtre est un argument théologique, de l’époque de la réforme et de l’inquisition et de l’époque, présente, de l’islamisme meurtrier.

Il souligne la puissance de l’idéologie et de la religion qui ne sont pas de simples superstructures qui reflètent la réalité sociale, mais de véritables forces agissantes; et nous met en garde contre le déni qui consiste à en minimiser le danger.

Il conclut avec Elie Barnavi : «Il est urgent de réaffirmer les règles indispensables à la domestication du «numineux» (du sacré), et à son maintien dans des limites civilisées. Ces règles existent; cela s’appelle la laïcité. Cette laïcité, sans laquelle il n’est pas de démocratie possible, il vous faut la défendre becs et ongles sans nuance ni faiblesse».

L’idée de ce travail est venue d’une série de lectures qui sont entrées en résonance et ont fait émerger en moi quelques idées qu’il me paraît utile de partager avec vous dans ce souci qui nous est commun de nous débarrasser de nos métaux dans notre quête de la vérité.

Tout a commencé lors de la table ronde organisée à Thoiry et au cours de laquelle est intervenu M. Christian Buiron, auteur de Sébastien Castellion, Penseur de la tolérance & de la liberté de conscience, premier ouvrage de la série de mes lectures.

Celui-ci fait référence au petit livre de Stefan Zweig, Conscience contre violence ou Castellion contre Calvin (CC), qui m’a ensuite amené à lire Érasme (E) du même auteur.

À la même époque j’ai également lu Les religions meurtrières (RM) d’Élie Barnavi, puis plus récemment Gouverner au nom d’Allah (GA) de Boualem Sansal, sous-titré Islamisation et soif de pouvoir dans le monde arabe, un petit livre extrêmement instructif par la mise en perspective de la situation actuelle au regard de l’histoire du monde arabe et de l’islam, ainsi que des différents courants de ce dernier.

Enfin je mentionnerai pour mémoire une lecture plus ancienne et très utile: La pensée extrême, Comment des hommes ordinaires deviennent des fanatiques (PE), de Gérald Bronner.

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Revenons donc 500 ans en arrière. À propos de Calvin, Zweig écrit:

Rien à Genève n’échappe à son pouvoir : le conseil et le consistoire, l’université et les tribunaux, les finances et la morale, les prêtres, les écoles, les sergents, les prisons, le mot imprimé et la parole, tout est sous son contrôle, dépend moralement de lui. La doctrine calviniste est devenue la loi, et celui qui ose élever contre elle la moindre objection, le cachot, l’exil ou le bûcher, ces arguments définitifs de toute dictature, lui ont bientôt enseigné qu’à Genève une seule vérité est tolérée, dont Calvin le prophète. (CC, p. 12).

Plus loin :

Un bourgeois sourit lors d’un baptême : trois jours de prison. Un autre, fatigué par la chaleur, s’est endormi pendant le prêche : la prison. … Des bourgeois ont été surpris jouant aux quilles : la prison. … Un homme s’est refusé à faire donner à son fils le nom d’Abraham : la prison. Un violoniste aveugle a fait danser au son de son instrument : expulsé de la ville. … Deux bateliers se sont battus sans qu’il y ait eu mort d’homme : exécutés. Pour avoir attaqué publiquement la théorie de la prédestination de Calvin un homme est fouetté jusqu’au sang à tous les carrefours de la ville, puis banni. … Jacques Gruet, rien que pour avoir appelé Calvin hypocrite est torturé et exécuté. (CC, p. 77-79).

Ce passage m’a immanquablement fait penser à ces régimes actuels ou plus anciens comme la république islamique d’Iran, l’Arabie Saoudite, ou l’Afghanistan des talibans. De même, lorsque Zweig écrit:

Malheureusement ces idéalistes et utopistes se démasquent presque toujours au lendemain de leur victoire comme les pires ennemis de l’intelligence. (CC, p. 18),

Je revois alors ce vieux monsieur en exil à Neauphle le château, promettant la liberté et la démocratie, avant de mettre ces promesses à exécution – c’est le cas de le dire – dans la République islamique d’Iran. Mais je pense aussi, à ce qu’il advint de la révolution française en 1793, ou plus tard de l’utopie communiste.

Mais revenons à nos brebis… Même si les relations entre Calvin et Castellion n’étaient guère idylliques, le premier étant jaloux du second, elles sont devenues franchement exécrables lorsque Calvin a fait condamner au bûcher Michel Servet, pour hérésie, après que ce dernier eut échappé à l’inquisition catholique à laquelle le même Calvin l’avait dénoncé bien qu’il fût censé en être l’ennemi. Toujours est-il que la polémique entre Calvin et Castellion tient essentiellement à trois choses:

-              Premièrement, il n’appartient pas au magistrat de condamner un hérétique (ce qu’a fait faire Calvin par le Conseil genevois, autorité civile). En cela Castellion prône la séparation des pouvoirs temporels et spirituels.

-              Deuxièmement, il n’appartient pas aux hommes, mais à Dieu seul, de décider de qui est hérétique et qui ne l’est pas. Castellion affirme aussi le caractère relatif de l’hérésie.

-              Troisièmement, il ne saurait être question d’exécuter un hérétique au risque qu’il ne le soit pas et de commettre ainsi une irréversible erreur, ce que Castellion résume par cette formule:

« Tuer un homme ce n’est pas défendre une doctrine, c’est tuer un homme ».

Nous sommes deux siècles avant les Lumières, plus de trois siècles avant la séparation de l’église et de l’État et l’instauration de la laïcité, plus de quatre siècles avant l’abolition de la peine de mort en France.

Cela vaudra à Castellion d’être poursuivi toute sa vie durant de la vindicte de Calvin, qui l’accusera même d’avoir volé du bois tandis qu’il était réfugié à Bâle, ville qui accueillait tous ceux qui fuyaient le fanatisme religieux, comme le dit Stefan Zweig :

L’Université garde encore l’héritage d’Érasme ; tous ceux qui ont été obligés de fuir les persécutions des dictatures ecclésiastiques se sont réfugiés dans cet ultime asile de l’humanisme. C’est là que vivent  Carlstadt, chassé d’Allemagne par Luther et Bernardo Ochino, chassé d’Italie par l’inquisition romaine ; c’est là que vivent Celio Cocino et Curione, et, caché sous un pseudonyme, l’anabaptiste David de Joris, proscrit des Pays-Bas. C’est là que réside Castellion chassé de Genève par Calvin.… Ces dissidents de toutes les dictatures mènent à Bâle une existence modeste de savant… seule une tristesse commune causée par l’enrégimentement croissant de l’esprit unit ces « remontrants » (c’est ainsi que qu’on appellera plus tard ces adversaires de toute terreur dogmatique). (CC, p. 171).

Vous relèverez, l’utilisation par Stefan Zweig du mot « dissidents » dans un texte qui date de 1936.

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Je vais maintenant rapidement dire quelques mots du livre d’Elie Barnavi, Les religions meurtrières. Celui-ci y développe neuf thèses :

1.            « Religion » est un mot valise

2.            Toute religion est politique

3.            Le fondamentalisme est une lecture particulière de la religion

4.            Le fondamentalisme révolutionnaire est une lecture totalitaire de la religion

5.            Les religions révélées connaissent plus que d’autres la tentation du fondamentalisme révolutionnaire

6.            Le fondamentalisme révolutionnaire chrétien est parti battu

7.            La chance du fondamentalisme révolutionnaire juif a été l’État, sa perte aussi

8.            L’islamisme est aujourd’hui la forme la plus nocive du fondamentalisme révolutionnaire

9.            Le combat contre le fondamentalisme révolutionnaire musulman est la grande affaire du XXIe siècle.

Je ne vais pas vous en faire un résumé ici, je vais simplement vous recommander sa lecture et revenir sur deux choses qui sont communes à Stefan Zweig et à Elie Barnavi. La première est la distinction qu’ils font tous deux entre le fondamentalisme pacifique et fondamentalisme révolutionnaire. Ainsi, Barnavi écrit-il :

Si le fondamentaliste cherche à faire « retour » aux fondamentaux de la foi, l’intégriste lui, entend figer toute évolution des croyances et des pratiques dans un système supposé définitif et immuable, dans une tradition sacralisée une fois pour toutes par l’usage et l’autorité des anciens… la religion n’est jamais un simple manteau dont on recouvrirait des intérêts inavouables. C’est une vraie cause, sans laquelle les autres auraient peut-être été insuffisantes pour allumer un conflit d’envergure… ce n’est pas une cause de plus, mais la première de toute, celle qui offre aux autres le ciment idéologique qui sinon leur aurait fait défaut. Car le fondamentalisme révolutionnaire est un système où la religion investit l’ensemble du champ politique en réduisant la complexité de la vie un principe explicatif unique, violemment exclusif de tous les autres. À l’instar du communisme du fascisme naguère il fonctionne comme une idéologie totalitaire (RM, pp. 48-52).

Et nous en venons là au deuxième point commun : la puissance de l’idée, la force de l’esprit. Je crois que notre mode de pensée est fortement imprégnée par ce que l’on a appelé le matérialisme dialectique et historique selon lequel les rapports économiques et sociaux constituent l’infrastructure des sociétés dont dépendent entièrement leurs superstructures : culture, religion, idéologie, mentalités, etc. Cela nous amène à nous porter systématiquement vers des explications sociologiques et à négliger la puissance de l’idéologie. À propos de cette puissance, Stefan Zweig écrit :

Il y a quelque chose d’exaltant malgré tout dans cette constatation que c’est toujours une idée, cette force la plus immatérielle qui soit sur Terre, qui arrive à réaliser de tels miracles de suggestion, et l’on serait facilement amené à admirer à glorifier ses grands séducteurs d’avoir réussi à transformer à l’aide de l’esprit la matière grossière. Malheureusement ces idéalistes et utopistes se démasquent presque toujours au lendemain de leur victoire comme les pires ennemis de l’intelligence (CC, p. 18).

Plus loin, il ajoute, plus optimiste :

Mais l’esprit est un élément mystérieux. Insaisissable invisible comme l’air, il semble s’adapter docilement à toutes les formes et à toutes les formules et cela pousse sans cesse les natures despotiques à croire qu’on peut le comprimer l’enfermer et le mettre en flacons. Pourtant toute pression provoque une contre pression et c’est précisément quand l’esprit est comprimé qu’il devient explosif : toute oppression mène tôt ou tard à la révolte (CC, p. 19).

Je rappelle qu’il écrit cela en 1936 alors que le nazisme triomphe et qu’il est en exil. De son côté, Elie Barnavi écrit :

… Il faut avoir le marxisme-léninisme bien chevillé au corps pour croire encore que la religion n’est qu’une « superstructure » qui masque les véritables enjeux socio-économiques de « l’infrastructure »… plus je vieillis et plus je me persuade que la véritable infrastructure des sociétés est mentale – en l’occurrence l’Islam, ou plutôt la version fermée, exclusiviste et autocentrée de l’islam qui a fini par s’imposer au Moyen Âge (MR, pp. 98 et 111).

Et en 1935, dans son livre sur Erasme, Stefan Zweig définit ainsi le fanatisme :

… le fanatisme, ce bâtard né de l’esprit et de la brutalité qui veut imposer à l’univers tout entier la dictature d’une idée (la sienne, bien entendu) en ne tolérant aucune autre forme de pensée, aucune manière de vivre que celle qu’il a choisie, le fanatisme qui divise la famille humaine en amis et en ennemis, en partisans et en adversaires, en héros et en assassins, en fidèles et en hérétiques; n’admettant que sa vérité, ne reconnaissant que son système, il lui faut recourir à la violence afin d’étouffer tous les autres au sein de cette diversité des choses voulues par Dieu. Les restrictions brutales à la liberté de penser, à la liberté de conscience, l’inquisition et la censure, le bûcher et l’échafaud, ce n’est pas à la violence qu’il faut les imputer, mais au fanatisme, ce génie de la partialité, cet ennemi héréditaire de l’universalité, ce prisonnier d’une idée unique qui essaie de traîner d’enfermer dans sa prison l’univers tout entier (E, pp. 92-93).

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Un autre point qui apparait de façon commune dans ces livres est la question de la conception des textes sacrés. Boualem Sansal le dit du Coran qui peut être conçu comme créé ou comme révélé ; il en va de même des autres textes. Pour Elie Barnavi, c’est ce caractère révélé qui rend les religions du livre propice à l’intégrisme. Doit-on prendre ces textes au pied de la lettre ou de façon symbolique ? Il y a-t-il une possibilité d’interprétation, donc une relativité, donc une tolérance de la divergence d’opinion ? Mais aussi une différence de degré dans la rigueur de la contrainte. Je cite Boualem Sansal :

Il y a le monde de l’islam qu’il faut protéger il y a le monde du mal dans lequel il faut porter la guerre. Pour le musulman pacifique et tolérant, ce sont là des notions symboliques, on combat le mal en le refusant. Pour l’islamiste radical, la guerre a pour but de tuer l’autre, celui qui contrevient aux lois de l’Islam… (GA, p. 65).

De même, Calvin répond à Castellion, à propos de Servet :

De même qu’un homme ordinaire serait coupable, s’il ne saisissait pas le glaive quand sa maison est souillée par le culte des idoles, et qu’un des siens se dresse contre Dieu, à plus forte raison un prince s’il fermait les yeux devant les violations de la religion… quiconque défend ou excuse un hérétique est lui-même coupable d’hérésie et mérite châtiment (CC, p. 167) .

Quant à l’interprétation, et à la question de savoir si le texte de l’écriture est toujours clair, contrairement à Calvin, Castellion écrit :

Les vérités de la religion sont mystérieuses par nature et sont encore, après plus de mille ans, l’objet d’une lutte sans fin où le sang ne cessera de couler si l’amour n’éclaire pas les esprits et ne finit par avoir le dernier mot… Si tout était aussi clair et manifeste qu’il y a un Dieu, les chrétiens pourraient facilement se mettre d’accord sur tout, mais puisque tout est obscur, les chrétiens ne devraient pas se condamner les uns les autres (CC, p. 177).

Le même débat a opposé Érasme à Luther, à ce propos Zweig écrit :

Érasme estime « que la tranquillité et la paix du monde sont supérieurs à la foi » tandis que pour [Luther], il faut défendre sa foi, dût-il en résulter pour l’univers non seulement la guerre mais encore la ruine la destruction. Et là où Érasme recommande sagement la prudence, signale l’obscurité de maints passages de la Bible qu’aucun mortel ne peut interpréter en toute certitude, en engageant sa responsabilité, Luther lui lance au visage : « sans certitude il n’y a pas de chrétienté. Un chrétien doit être sûr de sa doctrine et de sa cause ou bien il n’est pas chrétien. Celui qui, par tiédeur ou scepticisme, montre de l’hésitation dans les choses de la foi, celui-là doit cesser une fois pour toutes de se mêler de théologie… le Saint Esprit n’est pas un sceptique » (E, p. 162).

Pour mémoire, il s’en est suivi au moins deux siècles d’abord de guerres, puis de persécutions religieuses, en France et en Europe.

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Nous sommes aujourd’hui confrontés, avec l’islamisme, à une forme de fanatisme qui peut prendre diverses formes, extrêmement violentes ou prétendument modérées (à propos de l’islamisme modéré, Boualem Sansal nous dit qu’en Algérie la rue l’appelle « l’islamisme radical en costume-cravate » et parfois « Jekyll et Hyde »). Et toutes ces lectures m’ont amené à la conviction qu’il nous faut nous méfier de certains dangers auxquels nous portent nos habitudes de pensée, aussi bien-pensantes soient-elles.

J’ai évoqué la sous-estimation de l’idéologie, avec pour corollaire l’abus des explications exclusivement sociologiques, voire complaisantes. Je ne vais pas insister, nous pourrons aborder ces questions dans la discussion. Mais je crois qu’un danger qui nous guette est celui du déni, ce même déni qui a conduit à ne pas regarder en face, à minimiser le fascisme puis le stalinisme au motif que l’important était ailleurs, aujourd’hui, que les vrais coupables sont ailleurs. Elie Barnavi nous met en garde contre ce déni et, lui qui connaît bien la France, nous lance cette exhortation :

Cela passe par la réaffirmation de quelques règles simples, dont l’application ne doit souffrir aucune discussion, aucune compromission, aucune dérogation. Ici, on ne bat pas sa femme, on n’excise pas sa fille, on ne tue pas sa sœur sous prétexte qu’elle a souillé l’honneur de la famille en refusant le mari qu’on voulait lui imposer. Ici la conscience est autonome et la religion relève du libre choix de l’individu. Ici on ne tolère aucune manifestation de sectarisme religieux, les prêches haineux sont proscrits, l’incitation à la violence est interdit par la loi. La république est bonne fille, elle doit réapprendre à sortir les griffes… Il est urgent de réaffirmer les règles indispensables à la domestication du «numineux» comme disent les savants, et à son maintien dans des limites civilisées. Ces règles existent ; cela s’appelle la laïcité. Cette laïcité, sans laquelle il n’est pas de démocratie possible, il vous faut la défendre becs et ongles sans nuance ni faiblesse. (RM, pp. 163-164 et 169).

Et je conclurai en revenant à Stefan Zweig :

Quelle que soit la façon dont on veuille appeler les pôles de ce conflit permanent, tolérance contre intolérance, liberté contre tutelle, humanité contre fanatisme, individualité contre mécanisation, conscience contre force, tous ces mots ne font qu’exprimer les deux termes d’un problème qui se pose pour chacun de nous: faut-il se prononcer pour l’humain ou le politique, pour l’ethos ou le logos, pour la personnalité ou la communauté ? (CC, pp. 15-16).

Patrick Bollé

Références :

Christian Buiron: Sébastien Castellion, Penseur de la tolérance & de la liberté de conscience, Théolib, 2015.

Stefan Zweig: Conscience contre violence ou Castellion contre Calvin, Le livre de poche, 1976.

Stefan Zweig: Érasme, Grasset (Les Cahiers Rouges), 1976.

Élie Barnavi: Les religions meurtrières, Flammarion (Champs-actuel), 2016.

Boualem Sansal: Gouverner au nom d’Allah, Islamisation et soif de pouvoir dans le monde arabe,

Gérald Bronner: La pensée extrême, Comment des hommes ordinaires deviennent des fanatiques, PUF, 2016.